Depuis la loi CAP, le recours à l'architecte se fait à partir de 150 m². Quid des permis récents délivrés par exemple sur 160 m², et qui nécessitent un modificatif ?

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La loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, dite « loi CAP », complétée par le décret n° 2016-1738 du 14 décembre 2016, modifie les hypothèses de recours à un architecte. Plus précisément, l'article L. 431-3 du Code de l'urbanisme dans sa nouvelle rédaction dispose :

« Conformément aux dispositions de l'article 4 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture, par dérogation à l'article L. 431-1, ne sont pas tenues de recourir à un architecte les personnes physiques ou exploitations agricoles qui déclarent vouloir édifier ou modifier, pour elles-mêmes, une construction de faible importance dont les caractéristiques, notamment la surface maximale de plancher, sont déterminées par décret en Conseil d'État. Ces caractéristiques peuvent être différentes selon la destination des constructions. Pour les constructions édifiées ou modifiées par les personnes physiques, à l'exception des constructions à usage agricole, la surface maximale de plancher déterminée par ce décret ne peut être supérieure à 150 mètres carrés. »

L’article 82 de la loi, parmi d’autres dispositions relatives au permis d’aménager un lotissement ou aux concours d’architecture, entend favoriser la qualité architecturale et l’insertion des constructions dans leur environnement.

Dès lors que la surface de plancher dépasse 150 m² (C. urb., art. R.431-2, pour ce qui est des personnes physiques qui déclarent construire pour elles-mêmes des constructions autres qu’agricoles), le pétitionnaire doit recourir à un architecte pour l’établissement du projet architectural.

Cette exigence recouvre plusieurs réalités.

Premièrement, une demande de permis de construire initial portant sur un projet de construction nouvelle de plus de 150 m² - et non plus de 170 m² - de surface de plancher est soumise à l'intervention d'un architecte depuis le 1er mars 2017 – en application de l’article 2 du décret d’application de la loi CAP précité. Il est à noter que plusieurs dispositifs visent à lutter contre les signatures de complaisance.

Deuxièmement et de la même façon, une demande de permis de construire modificatif, dès lors que celle-ci aura pour effet d'augmenter la surface de plancher prévue au permis initial et de porter la surface globale au-delà du seuil fixé, devra mobiliser les services d'un architecte.

Cela sera le cas, a fortiori, si la surface de plancher de la construction projetée dans la demande de permis initial était déjà supérieure à 150 m².

Qu’en est-il des permis obtenus avant le 1er mars 2017 et développant une surface de plancher comprise entre 150 et 170 m² ?

Si les autorisations en cause sont exécutées et qu’elles ne peuvent plus faire l’objet de permis modificatifs, le pétitionnaire devra alors déposer une déclaration préalable ou un nouveau permis qui nécessiteront ou non, selon les hypothèses précisées ici, l’intervention d’un architecte.

Dans le cas contraire, en l’absence de dispositions législatives transitoires ou d’instruction du ministère, on peut proposer que deux situations soient distinguées :

  • le permis de construire modificatif emportant création d’une surface de plancher complémentaire devrait se voir appliquer le régime mentionné plus haut : la surface globale étant supérieure au nouveau seuil, le recours obligatoire à l’architecte devrait s’imposer – même si l’on peut s’interroger sur la portée de la mission de l’architecte au regard du projet antérieurement autorisé ou même à l’égard d’une modification mineure du permis ;
  • ce raisonnement ne peut être mécaniquement transposé au cas des permis de construire modificatifs qui n’emportent pas de création de surface de plancher supplémentaire, dès lors que le critère de déclenchement du recours obligatoire à l’architecte est bien de nature quantitative et non pas qualitative : elle dépend non pas de l’impact architectural de la modification, mais uniquement d’un seuil de surface de plancher. Sauf précision contraire du législateur ou du ministère et sous réserve de l’analyse qu’en feront les juridictions administratives, nous ne voyons pas de raison d’étendre à cette hypothèse le recours obligatoire à un architecte.

Une clarification de cette question serait bienvenue.

Troisièmement, demeure le cas d'un permis de construire délivré pour des travaux sur une construction existante, créant une surface de plancher nouvelle inférieure au seuil précité, mais portant la surface de plancher cumulée (construction existante + travaux nouveaux) au-delà des 150 m².

À ce sujet, l'article R. 431-2, al. 3 du Code de l'urbanisme prend soin de préciser :

« Les demandeurs d'un permis de construire sont tenus de recourir à un architecte pour les projets de travaux sur construction existante conduisant soit la surface de plancher, soit l'emprise au sol de l'ensemble à dépasser l'un des plafonds fixés par le présent article. »

Dans une telle hypothèse, il convient de prendre en considération la surface de plancher globale de la construction et ne pas s’en tenir à celle issue des seuls travaux nouveaux.

Enfin, remarquons que cette disposition ne vise que le cas du permis de construire et non la déclaration préalable. Les travaux réalisés sur des constructions existantes, dispensés de permis de construire mais relevant de la formalité de la déclaration préalable en application des dispositions des articles R.421-14 et suivants échapperont donc à l’obligation du recours à un architecte, quand bien même la surface de plancher totale dépasserait le seuil de 150 m².

Exception à l’exception : lorsque, dans les zones U des communes couvertes par un PLU, une simple déclaration préalable permet la réalisation d’une surface de plancher de 20 à 40 m², le dépassement du seuil des 150 m² emporte l’obligation de déposer un permis de construire dont le parti architectural sera conçu par un architecte (C. urb., art. R. 421-14, b)).

Sources :